ORGANICISME

ORGANICISME
ORGANICISME

De l’Antiquité à nos jours, on peut recenser de très nombreuses théories et philosophies sociales qui adoptent résolument une perspective organiciste grâce à laquelle elles mènent un parallèle entre l’organisation physiologique du corps humain et celle qui permet le fonctionnement du corps social. Que l’on considère les écrits d’Aristote, et en particulier la Politique , ceux de penseurs du Moyen Âge ou encore du XVIIIe siècle comme Hobbes ou Rousseau, sans cesse cette comparaison est établie. Elle se trouve, de plus, considérablement renforcée, à la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe, par le progrès des sciences physiques, qui, à partir du modèle de la machine, conçoivent la nature du corps humain non plus selon le vieux principe du vitalisme, mais au contraire comme un tout dont chacune des parties répond à une fonction nécessaire à l’ensemble. Pour Lavoisier, comme pour Lamarck ou Cuvier, l’organisation du monde vivant révèle en effet l’intégration des fonctions et donc des organes en un tout cohérent. Pour eux, l’organisme possède aussi des capacités d’adaptation et d’autorégulation qui lui permettent d’évoluer en fonction de son environnement et que feront resurgir à leur tour les théoriciens de l’organicisme social. Au XIXe siècle, Claude Bernard poussera encore plus loin cette analogie entre l’organisme vivant et l’organisme social: la biologie en arrive ainsi à fournir un modèle général du fonctionnement des systèmes qui n’a pas manqué d’exercer une forte influence sur les partisans d’une théorie plus systématique de l’organicisme social.

1. Les fondateurs de l’organicisme

Au début du XIXe siècle, l’organicisme a d’abord été conçu comme une réponse aux doctrines universalistes et individualistes de la Révolution française: instrument du conservatisme social, il a été utilisé aussi bien par Edmond Burke que par Joseph de Maistre ou Louis de Bonald. Grâce à lui, tous trois ont pu mettre l’accent sur l’unité organique du corps social, qui justifie la prééminence de la société sur l’individu, et donc celle du tout sur les parties. Pour eux, la société n’est nullement une construction rationnelle des individus qui établiraient entre eux des liens contractuels et volontaires, et toute atteinte à l’unité organique provoquerait aussitôt la désagrégation du corps social. Ils rejettent ainsi l’individualisme libéral et souhaitent au contraire le maintien des hiérarchies naturelles, des valeurs et des traditions collectives qui manifestent l’existence indépendante du tout par rapport à celle des parties.

S’inspirant de cet organicisme conservateur, mais s’appuyant aussi sur l’organicisme positiviste et réformiste de Saint-Simon (1760-1825), pour lequel la division des fonctions de l’organisme social représente un facteur de progrès, Auguste Comte s’est efforcé d’élaborer une synthèse entre ces deux courants organicistes opposés. Pour lui, la société prise comme un tout constitue la réalité première, et la différenciation des fonctions sur laquelle elle repose donne naissance à une hiérarchie naturelle qu’il est nécessaire de respecter. Dans son Système de politique positive , il élabore un parallèle entre l’organisme social et l’organisme biologique: il montre que la famille représente la cellule, tandis que les groupes sociaux constituent les tissus et l’État l’organe directeur. Cet organicisme positiviste et scientifique lui permet de repousser dans le passé les métaphysiques individualistes, rationalistes et révolutionnaires qui négligent l’origine naturelle du corps social.

C’est pourtant Herbert Spencer qui fait figure de véritable fondateur de l’organicisme. Après avoir démontré dans Les Premiers Principes (First Principles , 1862) la réalité de la loi de l’évolution selon laquelle la société se transforme d’elle-même en intégrant le changement et en s’adaptant à l’environnement, Spencer est naturellement conduit à comparer le système social à l’organisme physiologique qui se soumet également à la loi de l’évolution. Dans ses Principes de sociologie (Principles of Sociology , 1876-1896), il énumère d’abord un ensemble de caractéristiques qui leur sont communes: ils se distinguent l’un et l’autre de l’inorganique, du fait qu’ils se développent d’eux-mêmes; au fur et à mesure que leur taille s’accroît, ils deviennent de plus en plus complexes et différenciés du point de vue structurel et fonctionnel; tous deux, enfin, peuvent subsister un certain temps après la destruction de certaines parties internes. Mais Spencer relève néanmoins l’existence de différences importantes entre l’organisme et la société; alors que l’organisme individuel forme un tout concret, dans lequel les parties sont étroitement liées, dans l’organisme social les parties constituent un tout discontinu; de même, alors que dans l’organisme individuel les parties existent pour le bon fonctionnement du tout, dans l’organisme social c’est le tout qui fonctionne pour le bien des parties. Enfin, ce n’est que dans l’organisme social que toutes les parties sont capables de sentiments et de pensées. En raison de ces différences fondamentales, Spencer ne peut que consigner des ressemblances entre les deux systèmes et décrire les fonctions de nutrition, de distribution et de régulation qui s’exercent dans l’un comme dans l’autre. Mais, s’il tend à conclure en faveur de la simple analogie entre les deux systèmes, Spencer n’en a pas moins affirmé que «la société est un organisme», soutenant ainsi l’identité de nature qui prévaudrait entre l’organisme social et l’organisme biologique: c’est à partir de cette double perspective que vont s’élaborer des théories organicistes assez différentes les unes des autres.

Certains retiennent l’identité de nature et, en prenant pour modèle la biologie dont l’influence à cette époque est considérable, ils tentent de trouver des traits communs aux deux systèmes. P. von Lilienfeld par exemple, dans La Pathologie sociale (1896), croit pouvoir démontrer cette identité de nature en établissant un lien entre le système nerveux et les classes ou professions; il assimile du même coup l’État au cerveau et voit en lui l’unique médecin capable de lutter contre les maladies du corps social. Cette utilisation extrême de la biologie dans les sciences sociales est reprise par des auteurs comme G. De Greff ou J. Novicov. Tous retrouvent l’orientation conservatrice précédente; ainsi, Novicov remarque: «De ce qu’un organe remplit mal une fonction, il ne s’ensuit pas que son corps sera plus sain si on lui coupe la tête [...]. Parce que les aristocraties ont mal rempli leurs fonctions, on les a décapitées et, de nos jours, les sociétés ressemblent à des corps sans têtes.» Pour éviter de telles outrances, la plupart des théoriciens n’ont voulu conserver que l’idée spencérienne de l’analogie entre l’organisme biologique et l’organisme social. Il faut d’abord mentionner A. Schäffle, qui souligne d’emblée que le corps social est un organisme spirituel et non concret (Bau und Leben des sozialen Körpers , 1875-1878). Cette analogie lui semble néanmoins utile et il esquisse des parallèles entre les tissus protecteurs (vêtements, toits, etc.) et l’épiderme, entre l’armée, la police et les muscles, entre les institutions de contrôle et le système nerveux, etc. C’est à de semblables recherches d’analogie que se livrent Alfred Fouillée ou René Worms. Ce dernier (Organisme et société , 1896) s’est efforcé de recenser les traits communs aux organismes individuel et social: différenciation coordonnée des parties, changement par assimilation ou désintégration, etc.; par contre, selon lui, l’identité de nature disparaît dès que l’on tient compte du caractère bien plus complexe de l’organisme social qui résulte de sa «composition humaine»: pour cette raison, il qualifie ce dernier de «super-organisme». Ainsi, malgré certains excès, la tendance prédominante chez les fondateurs de l’organicisme semble privilégier la théorie de l’analogie aux dépens de celle de l’identité de nature.

2. Le tournant du siècle

La nature tout humaine de l’organisme social ne peut, en effet, que le différencier de l’organisme biologique dans lequel les parties sont naturellement dépourvues de conscience. On peut, par conséquent, situer dans la même perspective que celle de Worms l’organicisme de F. Tönnies, celui de Durkheim ou enfin celui auquel recourent de nombreux psychologues sociaux.

Si Tönnies reprend l’analogie organiciste pour décrire la communauté – Communauté et Société (Gemeinschaft und Gesellschaft , 1887) –, il l’envisage pourtant d’abord comme un tout issu d’un ensemble de volontés individuelles proches de la nature et qualifiées, de ce fait, d’organiques. Seule l’orientation réciproque des volontés organiques fait de la communauté «un organisme vivant», «un tout organique [qui] en tant que tel doit toujours être considéré par rapport à ses parties comme distinct et ayant une existence propre». Comme pour Worms, ce système social communautaire se trouve conçu mentalement par les individus et ne possède ainsi aucune réalité physique. Pour Tönnies, la société qui succède à la communauté, lorsque celle-ci se désintègre, repose sur un individualisme total qui ne peut donner naissance, même en esprit, à un ensemble organique. Ce rassemblement d’individus juxtaposés et séparés se rapproche, d’une certaine façon, de la société de masse prévue par les théoriciens conservateurs du XIXe siècle, qui voyaient eux aussi avec crainte disparaître l’unité du corps social.

Dans De la division du travail social , Durkheim a mis l’accent sur l’apparition d’une solidarité organique qui lie les individus dans une société industrielle par suite d’une forte division du travail. Il s’agit donc ici d’un organisme progressiste, semblable à celui de Saint-Simon, et de pure analogie, puisqu’il relie des individus. Mais, à partir d’une interdépendance identique, Durkheim a également révélé comment «en s’agrégeant, en se pénétrant, en se fusionnant, les âmes individuelles donnent naissance à une individualité, psychique si l’on veut, mais qui constitue une individualité psychique d’un genre nouveau» (Les Règles de la méthode sociologique ). Il ne conçoit donc l’organisme social qu’à l’aide d’une simple analogie avec l’organisme biologique et s’élève vivement contre toute identité de nature car, pour lui, seules les consciences individuelles possèdent une réalité physique. S’il s’intéresse à la «fusion» des âmes individuelles, c’est pour comprendre les mécanismes de l’«idéation collective» qui résulte de leur association. L’organicisme de Durkheim demeure par conséquent purement mental, et on ne saurait sans injustice le ranger dans le courant conservateur du siècle passé. Il débouche aussi tout naturellement sur la psychologie sociale, dont le but est d’étudier les représentations collectives unissant les individus en un corps social. Il était normal que les théoriciens de cette discipline, comme J. Baldwin, C. H. Cooley ou G. H. Mead, s’intéressent à leur tour à cette «idéation collective» qui mène à un organisme moral. Ainsi, selon Mead, l’acte social comprend l’interaction de différents organismes, c’est-à-dire «l’adaptation réciproque de leurs conduites dans l’élaboration du processus social». Grâce à ces communications et au langage qui en procède, l’esprit peut se développer, et, avec lui, la socialisation: la société est conçue comme un réseau dense de communications, comme une réalité mentale. Pour cette même raison, A. L. Kroeber la qualifiera plus tard de «super-organique».

L’analogie organiciste ne sert donc plus qu’à mettre en lumière l’aspect interindividuel et collectif des relations humaines. S’il va jusqu’à rejeter cette analogie, Max Weber, en combattant l’organicisme biologique, n’en retrouve pas moins une semblable unité mentale dans un système social qui se fonde sur les relations interindividuelles. Il commence en effet par reprocher à Schäffle de donner la primauté au tout alors que, pour lui, c’est l’individu qui est le fondement du système social; en effet, refusant les méthodes biologiques spécifiques des sciences naturelles, il veut parvenir à la compréhension subjective de l’action sociale individuelle qui repose sur une conscience que ne possèdent pas les parties d’un tout biologique. Weber s’est ainsi opposé à toute forme d’organicisme, même le plus atténué: son analyse ne s’en trouve pas moins proche de l’unité morale décrite par Durkheim ou même par Mead, puisqu’il reconstruit comme eux le système social à partir des motivations des acteurs individuels. L’utilité de l’analogie organiciste disparaît donc peu à peu.

3. Les applications contemporaines

Les recherches contemporaines se caractérisent par une application plus structurelle de l’organicisme. Reprenant l’image de l’interdépendance des parties, les fonctionnalistes l’appliquent à présent aux divers genres d’institutions sociales qui constituent, elles aussi, les parties d’un tout social. On abandonne l’analogie psychosociologique pour chercher dans l’organisme biologique un modèle du système social, retrouvant ainsi certaines tendances du siècle passé. Par là même, on est conduit à examiner l’agencement des parties formant ensemble une structure et exerçant chacune une fonction. À l’instar de Spencer, pour lequel les fonctions de reproduction ou de distribution étaient remplies par certaines parties dans l’organisme biologique comme par certaines institutions dans l’organisme social, les fonctionnalistes, tel B. Malinowski, soutiennent que «l’analyse fonctionnelle de la culture part du principe que, dans tous les types de civilisation, chaque coutume, chaque objet matériel [...] remplit une fonction vitale, a une tâche à accomplir, représente une partie indispensable d’une totalité organique». Pour Malinowski, la fonction d’une institution se rapporte aux besoins biologiques de l’organisme humain. Mettant l’accent sur «le déterminisme biologique du système social», ce fonctionnalisme absolu se rapproche de l’organicisme extrême qui décelait une identité de nature entre l’organisme humain et l’organisme social. Malgré ces excès, Malinowski a remarquablement mis en lumière l’interdépendance des parties d’un système social qui est semblable, de ce point de vue spécifiquement fonctionnaliste, à l’organisme biologique.

Cette même interdépendance réapparaît dans les écrits des fonctionnalistes relativistes, qui emploient à leur tour l’analogie organiciste sans supposer pour autant une identité de nature. Dans Structure et fonction dans la société primitive (Structure and Function in Primitive Society ), A. R. Radcliffe-Brown a montré comment l’analyse fonctionnelle ne devait se servir de cette analogie qu’avec une extrême prudence, car, dans l’organisme social, les organes peuvent changer de fonction; celle-ci peut être exercée par divers organes qui, dans certains cas, peuvent devenir eux-mêmes «afonctionnels». Cet auteur ouvre ainsi la voie à un fonctionnalisme très souple, que R. K. Merton s’efforce de présenter de façon plus systématique dans son célèbre paradigme, déterminant de la sorte les impératifs fonctionnels qui permettent d’étudier les systèmes ou sous-systèmes socio-culturels [cf. FONCTION ET FONCTIONNALISME].

L’unité fonctionnelle de l’organisme biologique ne saurait, dans cette optique, se retrouver d’emblée dans l’organisme social. On s’éloigne par conséquent de plus en plus du strict organicisme tel que le pratiquent encore O. Spengler ou A. Toynbee, pour ne conserver que l’image de l’organisme et en rechercher chaque fois l’utilité (en architecture par exemple, voir les réalisations de l’architecte américain Frank Lloyd Wright). L’organisme se présente alors comme l’un des modèles grâce auxquels il devient peut-être possible de construire une théorie générale du système social.

organicisme [ ɔrganisism ] n. m.
• 1846; de organe
1Philos. Doctrine d'après laquelle la vie est le résultat de l'organisation.
2Méd. Doctrine selon laquelle toute maladie a pour cause la lésion d'un ou plusieurs organes.

organicisme nom masculin Doctrine qui professait que toute maladie se rattache à la lésion d'un organe. Doctrine du XIXe s. affirmant que l'organisation et le fonctionnement de la société sont comparables aux modes d'organisation et de fonctionnement des organismes vivants. Doctrine qui se réfère à un support organique pour analyser les fonctions mentales et leurs troubles.

organicisme
n. m.
d1./d PHILO Théorie selon laquelle la vie résulte, non d'une force qui anime les organes, mais de l'activité propre de l'ensemble des organes eux-mêmes.
d2./d MED Théorie qui rattache toute maladie à une lésion organique.
d3./d SOCIOL Doctrine qui assimile les sociétés à des organismes vivants.

⇒ORGANICISME, subst. masc.
A. PHILOS. Doctrine d'après laquelle la vie résulte de l'organisation du corps, du fonctionnement des organes eux-mêmes. L'organicisme imagine une liaison organique de la durée (J. VUILLEMIN, Être et trav., 1949, p.80):
1. Les conceptions intermédiaires, qu'il s'agisse de l'organicisme biologique, ou du behaviourisme finaliste en psychologie, ne sont que de vaines subtilités, dissimulant une profonde indécision de pensée et la contradiction interne d'un «cercle carré».
RUYER, Cybernétique, 1954, p.168.
B. MÉD. [Correspond à organique A pathol.] Doctrine d'après laquelle toute maladie a son origine dans la lésion d'un ou de plusieurs organes et qui accorde une place prépondérante à l'anatomie pathologique. Il existe encore des médecins d'un grand mérite qui perdent leur temps à discuter le vitalisme, l'animisme, l'organicisme, etc... Ce sont là les restes historiques d'une autre époque (Cl. BERNARD, Princ. méd. exp., 1878, p.190).
C. SOCIOL. Doctrine qui assimile la société à un organisme vivant. Dans ses Principes de sociologie 1879, il [Spencer] tente d'appliquer les thèmes généraux de son évolution à la vie sociale, sous la forme d'un organicisme intransigeant qui réduit la sociologie à la biologie (Hist. sc., 1957, p.1571).
ÉCON., POL. Doctrine qui assimile le système économique à un corps vivant (d'apr. BERN.-COLLI Extr. 1976):
2. ... on étonnerait sans doute beaucoup les théoriciens (...) en leur disant qu'ils ne sont pas parvenus à rompre complètement avec les naïvetés de l'organicisme (...). Pour l'organicisme de toutes formes, la nation est essentiellement un «grand individu»...
PERROUX, Écon. XXe s., 1964, p.137.
Prononc.: []. Étymol. et Hist. 1. 1846 «doctrine qui fait remonter la vie aux organes eux-mêmes» (ROSTAN, Exposition des principes de l'organicisme ds LAL. 1968); 2. 1855 méd. «théorie ramenant toute maladie à une lésion matérielle d'un organe» (LITTRÉ-ROBIN); 3. 1901 sociol. «doctrine qui assimile les sociétés à des organismes vivants» (BOUGLÉ, Le Procès de la sociologie biologique, Rev. Philos. II, 140 ds LAL. 1968). Dér. sav. de organique; suff. -isme. Fréq. abs. littér.: 31.
DÉR. 1. Organicien, -ienne, adj. et subst. a) Méd. a/ ) Qui est relatif à l'organicisme. Synon. organiciste (infra dér. 2 a). Ainsi, avec l'école organicienne (...), l'étude morphologique des tumeurs va prendre son complet développement (ROUSSY ds Nouv. Traité Méd. fasc. 5, 2 1929, p.23). b/ ) (Celui, celle) qui est adepte de l'organicisme. Synon. organiciste (infra dér. 2 b). C'est [M. Littré) un physiologiste et un organicien en toute étude (SAINTE-BEUVE, Nouv. lundis, t.5, 1863, p.251). b) [En parlant d'un chimiste] Qui est spécialisé en chimie organique. Berthelot, le grand chimiste organicien français (PLANTEFOL, Bot. et biol. végét., t.1, 1931, p.287). Cette théorie (...) devait se développer, rendre de grands services, puis se heurter à de graves objections, surtout de la part des chimistes organiciens (Hist. gén. sc., t.3, vol.1, 1961, p.207). Empl. subst. Quand les organiciens ont été amenés à imaginer des doubles et des triples liaisons, ils devaient, non seulement, tenir compte du jeu des valences, mais encore expliquer toute une série de réactions d'addition qui confirmaient leur schéma (CAILLIÈRE, HÉNIN, Minér. argiles, 1963, p.23). Les travaux des biochimistes attiraient l'attention des organiciens sur des composés tels que les stéroïdes, (...) les vitamines, les acides nucléiques et les hormones (Hist. gén. sc., t.3, vol.2, 1964, p.436). [], fém. [-]. 1res attest. 1858 méd. subst. et adj. «relatif à l'organicisme» (LITTRÉ-ROBIN), 1931 «qui est spécialisé en chimie organique» (PLANTEFOL, loc. cit.); de organicisme, suff. -ien. 2. Organiciste, adj. a) Qui relève de l'organicisme. Synon. organicien (supra dér. 1 a ). La médecine expérimentale (...) ne sera ni vitaliste, ni animiste, ni organiciste (Cl. BERNARD, Introd. ét. méd. exp., 1865, p.348). La différenciation progressive des sociétés et des organismes complète la vision organiciste de l'univers en la replaçant dans le temps (J. VUILLEMIN, Être et trav., 1949, p.75). Ce n'est pas ici le lieu de montrer en détail avec quelle aisance et quelle cohérence cette interprétation organiciste du fait social explique (...) la marche de l'histoire (TEILHARD DE CH., Phénom. hum., 1955, p.340). b) Qui est adepte de l'organicisme. Synon. organicien (supra dér. 1 a ). Les deux erreurs opposées de l'«atomistique» des historiens superficiels, qui appellent décrire une civilisation en inventorier pêle-mêle les aspects divers, et de l'«intégralisme» des théoriciens organicistes du type Spengler-Toynbee (MARROU, Connais. hist. 1954, p.175). Empl. subst. On imagine aisément les développements philosophiques (...) d'un organiciste, disciple de Goldstein, sur les performances de la machine d'Ashby, si on lui jouait le mauvais tour de les lui donner à interpréter en lui cachant qu'il s'agit d'une machine (RUYER, Cybernétique, 1954, p.68). Quelques auteurs de second plan comme A. Schaffle (1831-1903), organiciste, L. Gumplowicz (1838-1909), darwiniste social (Traité sociol., 1967, p.54). []. 1res attest. 1858 subst. et adj. «en méd. relatif à l'organicisme» (LITTRÉ-ROBIN), 1900 sociol. subst. (NOVICOW, Les castes et la sociologie biologique, Rev. philos. II, 373 ds LAL. 1968); de organicisme, suff. -iste.

organicisme [ɔʀganisism] n. m.
ÉTYM. 1846; dér. sav. de organique.
1 Philos. Doctrine d'après laquelle la vie est « le résultat de l'organisation » (Janet). || Bichat, Claude Bernard, partisans de l'organicisme (organicistes).
2 (P.-ê. par l'angl. organicism, 1853). Méd. Doctrine d'après laquelle toute maladie a pour cause la lésion d'un ou plusieurs organes.REM. En ce second sens, le mot a une valeur très proche de matérialisme.
0 (…) l'exploitation des hypothèses et des techniques psychanalytiques a suscité des essais — et par conséquent des erreurs — dans diverses directions, et notamment dans la direction « psychogénique »; mais celle-ci n'est pas privilégiée : on trouverait de quoi reprocher à Freud lui-même un « organicisme » outrancier (…)
Daniel Lagache, la Psychanalyse, p. 77.
DÉR. Organiciste.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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